CAPSULITE RÉTRACTILE, ALGONEURODYSTROPHIE, SYNDROME DOULOUREUX RÉGIONAL COMPLEXE
Le syndrome douloureux régional complexe (SDRC) ou anciennement appelé algoneurodystrophie ou syndrome algo neuro dystrophie est une pathologie fréquente et méconnue qui touche aussi bien les hommes que les femmes, et aussi bien les adultes que les enfants. Elle survient à tout âge et dans des circonstances encore mal élucidées. Nous décrivons ici un résumé des étiologies, des symptômes et des traitements pour bien comprendre de quoi nous parlons.
Les membres inférieurs sont plus touchés que les membres supérieurs, et les articulations distales sont plus touchées. Le pied est plus touché que la hanche par exemple.
Cet article fait le point sur les symptômes, le diagnostic, les traitements et la prise en charge kiné.
L’algoneurodystrophie est caractérisée par:
- déminéralisation osseuse
- douleurs intenses
- raideur articulaire qui s’installe progressivement
- troubles vasomoteurs avec une hyperhémie
- un oedème
Il existe des SDRC de type 1 en cas d’absence de lésion nerveuse et de type 2 en cas d’association de lésion nerveuse.
Etiologies
Traumatique: c’est la cause la plus fréquente.
- fracture dans 1/3 des cas
- autre traumatisme: luxation, entorse, contusion, blessure par arme,…
- traumatisme chirurgical: chirurgie orthopédique, immobilisation de longue durée sous un plâtre
- kinésithérapie mal dosée, mal conduite, trop intense et douloureuse
- cela peut être aussi un traumatisme psychique
- le traumatisme déclenchant la pathologie peut survenir à distance, c’est à dire qu’un traumatisme à la main peut entraîner une algodystrophie de l’épaule
- il n’existe pas de lien entre l’intensité du traumatisme et l’intensité du syndrome douloureux régional complexe
Non traumatique:
- maladie cardiaque: infarctus, AVC, angor, péricardite
- pathologie neurologique: hémiplégie, paraplégie, canal carpien, zona
- autres causes: grossesse, affection médicamenteuse, infection, lésion tumorale, affection Dans 1/3 des cas on ne retrouve pas de cause probante et le SDRC est dit idiopathique. On retrouve fréquemment un contexte anxieux et dépressif mais pour certains auteur cela serait la conséquence du SDRC ou d’une maladie chronique. Il faut rechercher systématiquement une fracture qui serait passée métabolique (diabète, hyperthyroïdie,…), affection rhumatologique (tendinopathie calcifiante de l’épaule, tendinite calcifiante du tendon d’achille, psoriasis…)
- inaperçue.
Pendant un moment on a cru qu’il s’agissait d’un dérèglement du système nerveux sympathique mais actuellement cette hypothèse est remise en cause.
Evolution de la maladie
L’algodystrophie évolue en 2 phases distinctes: la phase chaude et la phase froide, parfois avec une phase 3 dite des séquelles.
Le patient est informée de la longue durée de l’atteinte avec un retentissement socioprofessionnel important. L’évolution est favorable dans 90% des cas avec une guérison complète. Il existe moins de complications et moins de séquelles pour l’algodystrophie de la hanche et l’algodystrophie du genou.
Localisations les plus fréquentes
Epaule :
- on parle de capsulite rétractile en employant souvent le terme d’épaule gelée puisque la mobilité du membre supérieur peut être complètement bloquée. Dans ce cas, c’est la capsule articulaire qui se rétracte progressivement et qui entraîne la perte de mobilité.
- La cause est rarement identifiée, mais l’expérience clinique montre qu’une tendinopathie calcifiante mal traitée peut entraîner une capsulite dans de nombreux cas.
- la pathologie évolue de 6 mois à 2 ans.
- attention: la scintigraphie peut être négative dans la capsulite rétractile
- récupération et guérison habituellement complète
- association avec la main dans les atteintes intra thoraciques: on parle de « syndrome épaule-main ». On le retrouve rarement et dans les cas de cancer bronchique, d’infarctus du myocarde, de pathologie coronarienne, AVC, tumeur cérébrale. Les séquelles sont fréquentes dans les syndromes épaule main.
Hanche :
- au 3ème trimestre de la grossesse ou en post partum
- diagnostic différentiel avec l’ostéonécrose aseptique de la tête fémorale = IRM +++
PHASE CHAUDE:
Elle est d’installation progressive et s’étend de quelques semaines à quelques mois (en général 3 mois). Elle est souvent absente chez l’enfant.
- troubles de la micro-circulation locale
- déminéralisation osseuse locale
- douleurs inflammatoires intenses, avec présence de réveils nocturnes, non calmées par le repos
- les douleurs sont localisées à une région articulaire comme la cheville ou l’épaule par exemple et plus ou moins étendue au reste du membre
- les douleurs sont d’installation progressive, jamais maximale d’emblée
- l’intensité des douleurs est variable et s’accompagne de brûlures et de décharges électriques
- on retrouve une hyperesthésie cutanée (=douleur intense de la peau retrouvée juste au toucher) dans 50% des cas
- impotence fonctionnelle de plus en plus grande car l’articulation s’enraidit progressivement
- on retrouve des signes vasomoteurs locaux
- oedème ferme et douloureux à la palpation
- hyperthermie cutanée locale (=augmentation de la température de la peau)
- hyperhydrose (=augmentation de la transpiration locale, on a la paume de la main ou le creux de l’aisselle moite)
- fonte musculaire locale
- perte de la pilosité
- la peau est rouge ou rosée, luisante, marbrée, fine
- diminution de la mobilité passive et active, on retrouve fréquemment un mouvement précoce de la scapula au cours des mobilité passive de l’épaule par exemple.
PHASE FROIDE:
Elle survient d’emblée et dure de 6 à 24 mois dans les cas les plus sévères.
- raideur articulaire ++++.C’est le signe caractéristique de cette phase. C’est la conséquence de la rétraction des tissus mous péri articulaires. A l’épaule on parle de capsulite rétractile.
- douleur modérée, d’allure mécanique, constante
- la peau est froide, cyanosée, avec une perte de la pilosité, les ongles sont cassants et striés
- il peut exister une phase séquellaire où le patient perd un peu de mobilité
En règle générale on explique au patient que ce n’est pas une pathologie grave mais en revanche elle est longue et douloureuse.
Examens paracliniques
EN 1ÈRE INTENTION :
Radiographies :
Elles sont réalisées en première intention. On retrouve des signes classiques mais qui sont inconstants. Il est important de noter qu’il existe un retard radiologique d’environ 2 à 4 semaines après le début de l’atteinte et que le bilan radiologique initial peut être négatif. Ce bilan sera alors répété.
- interligne articulaire conservé
- déminéralisation osseuse articulaire, aspect moucheté de l’os
- épaississement des parties molles (c’est le signe le plus précoce)
Scintigraphie osseuse :
Elle est réalisée en première intention lorsque le diagnostic est évoqué. Il s’agit d’un examen très sensible dès les premiers signes de la pathologie. En revanche, la scintigraphie est non spécifique de l’algodystrophie.
C’est un examen complémentaire puisqu’il est non spécifique de la pathologie.
EN 2NDE INTENTION:
- il doit être réalisé en phase chaude et permet le diagnostic différentiel ou bien l’exploration de localisation difficile comme la hanche
- l’IRM est inutile en phase froide puisque l’examen est normal. C’est le premier examen à se normaliser précocement.
- en phase chaude on retrouve: un oedème osseux diffus, un oedème des tissus mous péri articulaires.
- l’IRM permet le diagnostic différentiel avec d’autres atteintes
- le bilan sanguin est normal et permet d’éliminer d’autres diagnostics comme une arthrite septique
- mobilisation activo passives pour lutter contre les adhérences tissulaires
- traitements antalgiques par électrothérapie TENS, ultrasons, Técarthérapie, cryothérapie plusieurs fois par jour en phase chaude
- lutte contre la raideur en phase froide avec des mobilisations globales, analytiques, et surtout spécifiques qui va permettre d’étirer les tissus mous péri articulaires et ainsi libérer l’articulation
- absolument sans douleur sinon on aggrave la maladie
- bains écossais: alternance de bains froids et chauds pendant 20 minutes à raison de 2 minutes dans le chaud et 2 minutes dans le froid pour améliorer la vascularisation locale. Cette technique est facile pour les extrémités dans membres (pied et cheville) en revanche c’est plus compliqué pour l’épaule et la hanche
- balnéothérapie pour travailler l’articulation dans l’eau: décharge, travail musculaire à minima, mobilisations dans l’eau, massages au jet d’eau
- travail fonctionnel en fonction de la région atteinte
- travail sur l’amélioration du contrôle moteur
- apprentissage d’auto exercices à réaliser à la maison en dehors des séances: auto-mobilisations, automassages, exercices musculaires et exercices musculaires, auto-postures pour la capsulite rétractile
Complications de l’algoneurodystrophie
Elles sont rares et ne concernent que 10% des cas mais elles sont désespérantes. Les symptômes persistent et deviennent chroniques. Il persiste des douleurs, des troubles vasomoteurs, des raideurs articulaires et une amyotrophie régionale.
Traitements de l’algoneurodystrophie
Toute algoneurodystrophie doit être traitée étiologiquement.
- mise au repos de l’articulation et de la région. Une décharge de courte durée peut être proposée. Cela doit être correctement dosé car une immobilisation ou un edécharge de trop longue durée entraînera une majoration des symptômes, notamment la déminéralisation osseuse et l’amyotrophie. La trophicité des tissus nécessite des contraintes liées aux mouvements et aux appuis du poids du corps.
- antalgiques de niveau 1 ou niveau 2
- éventuellement anti inflammatoires non stéroïdiens
- traitement à la calcitonine pour limiter la déminéralisation osseuse (peut ne pas marcher…)
- rééducation et kinésithérapie précoce, non douloureuse, progressive, douce, au moins 3 fois par semaine.
- travail en douceur pour récupérer les mobilités
- massages doux sauf si la peau est douloureuse
- soutien psychologique car l’atteinte est longue
- traitement préventif:
- immobilisation la plus courte possible
- plâtre le plus supportable possible et surveillance
- antalgiques en post opératoire systématiquement
- kinésithérapie sans douleur
- décharge avec des cannes anglaises
- arrêt de travail si besoin
Conclusion
C’est une pathologie multifactorielle, longue, douloureuse mais pas grave. Le traitement et la kinésithérapie est indispensable